La race porc Cul Noir Limousin fait partie des 6 races rustiques et locales de porc français. De souche ibérique, on nomme cette race “Cul Noir” en raison des taches noires qui mouchètent son corps et particulièrement son arrière-train. Bon marcheur, véritable garde-manger sur pattes, le Cul Noir du Limousin fabrique un gras et donc une viande exceptionnelle, et fait de lui un cochon qui a tout bon !
Une race en voie d’extinction aujourd’hui sauvegardée
Petite histoire du Cul Noir
Établi il y a plus de 5 siècles à l’ouest du massif central, le berceau de la race se situe aux alentours de Saint-Yrieix-la-Perche en Haute-Vienne, dans le Limousin ; 98% des effectifs de reproducteurs se trouvent encore là-bas de nos jours. Au XIXe siècle, la race est à son apogée, très prisée pour l’épaisseur de son lard ; la graisse servait alors pour la conservation de la viande à la place du sel, cher et lourd de taxes dans cette région !
La viande de porc Cul Noir nourrissait les Limousins. Les familles possédaient un ou deux porcs dans leur basse-cour, qui avaient la liberté d’aller glaner racines et glands dans la forêt environnante.
Au XVIIIe siècle, elle a permis à bon nombre de familles d’éviter la famine. En effet, le Limousin était alors le principal armateur de l’armée de France ; ce statut privilégié connut un coup d’arrêt quand on ferma les forges, à la suite d’un accord entre l’Angleterre et la France.
Par ailleurs, la qualité de la viande et du lard de ce cochon l’a fait connaître jusqu’à Bordeaux, où la bourgeoisie locale en était friande. Les cochons marchaient alors jusqu’à Bordeaux, et on raconte que tout le long du périple, on entendait les enfants chanter “les culs sont noirs, les culs sont noirs” ! Arrivés en ville, ils étaient abattus, vendus aux commerçants bordelais ou envoyés vers les Amériques ou les Indes par bateaux.
Puis, l’avènement du chemin de fer au début du XXe siècle facilite encore davantage les échanges entre la première région productrice de porc en France et Bordeaux.
De l’extinction programmée…
De 160000 têtes en 1929, les effectifs chutent à une cinquantaine d’individus au début des années 1980 ! L’exode rural qui a suivi la seconde guerre mondiale a pour conséquence la désertification des campagnes ; il marque alors la fin de l’agriculture ancestrale. S’en sont ensuivi l’industrialisation de masse et les logiques de performances des années 1970, qui ont précipité le désintérêt pour la race : l’élevage est trop long et leur viande est trop grasse, et on préfère privilégier les races productives, qui s’élèvent vite… Une loi sur l’élevage en 1966 interdit d’ailleurs l’élevage des races non référencées… Si le livre généalogique limousin avait été créé en 1935, ce dernier avait été supprimé pendant la seconde guerre mondiale ; il n’avait pas repris son activité au sortir de la guerre. La race faisait donc partie des races prohibées pour l’élevage !
Quelques irréductibles éleveurs ont permis à la race de ne pas s’éteindre. Les 3 derniers verrats Cul Noir sont cachés en 1979 pour éviter qu’ils ne soient abattus lors d’un contrôle de la gendarmerie chez les verratiers, alors que la race était interdite !
… à une prise de conscience collective
En 1981, à l’occasion de l’année du patrimoine, les ministères ont pour mission de recenser leur patrimoine. C’est le patrimoine vivant qui intéresse alors le ministère de l’Agriculture ; c’est le début d’un nouveau souffle pour le Cul Noir Limousin. En effet, on dénombre alors une cinquantaine de cochons de souche “Cul Noir” ; à partir de ce petit cheptel commence un travail de conservation et de relance.
En 1993, c’est la création du syndicat des éleveurs de porcs Cul Noir Limousin. En 1997, la race est officiellement reconnue par le ministère de l’Agriculture ; l’année précédente, elle était entrée au LIGERAL, (Livre Généalogique Collectif des Races Locales de porcs). Cette race, qui demeure à faible effectif, est aujourd’hui sauvée de l’extinction ! En 2010, on comptait 850 verrats reproducteurs !
Un cahier des charges strict
Reconnaître le cochon Cul Noir Limousin
C’est le pelage du Cul Noir Limousin qui est très caractéristique. De couleur blanche légèrement rosée, deux plaques noires (qu’on appelle les “écussons”, d’où le nom de “porc aux deux écus” au XVIIe siècle) parsème son corps. La première se situe sur la tête et le cou, la seconde sur la croupe.
Le cahier des charges
Les animaux doivent être de race pure Cul Noir Limousin et inscrits au LIGERAL, et toute la phase de production doit avoir lieu sur une zone géographique au carrefour des 3 départements limousins, Creuse, Haute-Vienne et Corrèze (ainsi que sur les cantons limitrophes de l’est de la Dordogne et de l’est de la Charente). Aucune insémination artificielle n’est tolérée.
La croissance est lente : les porcs ne peuvent pas être abattus avant 18 mois. Les animaux évoluent en plein air, et marchent de grandes distances toute la journée, sur des parcours de bois et de prairies. Les porcelets sont retenus en box paillés au maximum 4 semaines au moment du sevrage.
Côté alimentation, ils se nourrissent de ce que leur offre la nature, racines, tubercules, fruits, herbes. Ils bénéficient d’un apport en céréales ainsi qu’en protéines, vitamines et oligo-éléments pour équilibrer les rations. En automne, ils s’alimentent essentiellement de glands et de châtaignes, ce qui est caractéristique pour la saveur de la viande.
Enfin, le bien-être animal est au centre des élevages. L’élevage doit être extensif, avec 40 animaux par hectares (ou 15 truies) maximum. Par ailleurs, il est interdit de couper les queues et de limer les dents des porcelets. Enfin, les porcelets ne peuvent être coupés de leurs mères avant 6 semaines minimum.
La viande de porc Cul Noir Limousin
La viande de porc Cul Noir Limousin se caractérise par son incroyable persillé, développé tout au long de la croissance du cochon qui marche énormément et donc produit du gras de couverture qui s’infiltre ensuite et va nourrir la viande et lui donner onctuosité, moelleux, mais aussi une saveur caractéristique de châtaignes. Le gras est un critère pour la qualité de la viande de Cul Noir ; plus vous aurez de gras, plus la viande sera moelleuse !
Conseils en cuisine
Pour ne pas dénaturer la saveur inimitable de la viande de Cul Noir, il y a quelques règles d’or à respecter en cuisine.
– Saisissez vos morceaux à griller comme une viande rouge (une à deux minutes maximum par face), en utilisant une poêle, un grill ou une plancha
– Poursuivez lentement la cuisson, sans la saler ni la poivrer.
– Dégustez la viande rosée à cœur, c’est ainsi qu’elle dégagera le maximum de saveurs ! Comme il existe un contrôle strict de tous les animaux, il n’y a aucun risque d’un point de vue sanitaire (ténia, notamment)
– À la cuisson, le gras de la viande demeure ferme tout en étant fondant, donc consommable et très gouteux… Ne le jetez pas ! Si vous ne voulez pas le déguster, conservez-le dans une boîte hermétique et utilisez-le en guise de matière grasse. Ce sera un régal pour vos pommes de terre sautées par exemple !
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Bonjour peut on elever cette race en gironde.je souhaites créer un petit elevage d’une douzaine d’individu. Pouvez vous me donner sur cette race magnifique .
Bonjour,
Oui, il est tout à fait possible d’élever le porc cul noir du Limousin en Gironde, à condition de respecter les besoins spécifiques de cette race rustique. Le cul noir du Limousin est une race autochtone ancienne, particulièrement adaptée aux élevages extensifs et semi-extensifs. Elle s’épanouit dans un environnement naturel, idéalement boisé, où les porcs peuvent se nourrir de façon variée, notamment de glands, de châtaignes et de fourrages.
Côté réglementation, il faudra se renseigner auprès des autorités locales et des associations d’élevage. Il existe des labels, notamment le Label Rouge et l’AOP, qui garantissent des critères spécifiques de production en fonction des régions, et certains sont exclusifs à certaines zones (comme le Limousin pour l’AOP). Cependant, en Gironde, il est possible de produire du porc cul noir en respectant des pratiques artisanales et des standards de qualité élevés, même sans label officiel.
Passez une bonne journée et à bientôt 🙂
Julie