Début octobre 2020, notre petite équipe s’est aventurée au Mont Saint-Michel, direction la Ferme des Obiones. Nous avons rendu visite à Sophie et Félix, tous deux éleveurs d’agneau de pré-salé. Nous en sommes repartis les poumons remplis de bon air iodé, d’images plein la tête et de connaissances approfondies sur cet élevage si réputé !
Attention ! Félix et Sophie ont une toute petite production. Aussi, les ventes de viande, pour les connaisseurs ou pour les avides de découverte dans l’assiette, sont limitées… Et comme c’est une production saisonnière, vous n’en aurez pas toute l’année en vente sur Pourdebon !
L’agneau de pré-salé à la ferme des Obiones
Arrivés à Roz-sur-Couesnon, en Bretagne dans la baie du Mont Saint-Michel, sous un temps très pluvieux. La chance nous a finalement souri, car nous avons pu aller visiter les herbus situés à 5 km de la ferme, sous un ciel certes chargé, mais parsemé de magnifiques éclaircies ! Nous vous racontons ce que nous avons appris …
Un site protégé par le conservatoire du littoral
Pour commencer, Sophie et Félix se sont installés il y a 2 ans maintenant, sur des terres du conservatoire du littoral. Cela nécessite que Sophie et Félix soient particulièrement scrupuleux du respect de l’environnement et de la biodiversité qui les entourent, protégée parce que menacée par l’extension préoccupante du chiendent maritime.
Le cheptel et ses caractéristiques
Le cheptel de la Ferme des Obiones se compose de 350 brebis et de leurs agneaux, mais aussi 10 béliers et 2 chiens de troupeaux, indispensables à la bonne discipline de toute la petite famille !
Reproduction et naissance de l’agneau de pré-salé
Côté reproduction, les brebis sont “mises en lutte” en août avec les béliers ; la reproduction est naturelle et respecte le cycle des brebis. Aucune hormone ou autre intervention humaine ou médicamenteuse n’entre en jeu. Il faut compter environ 1 bélier pour… 30 brebis !
Côté naissance, les agneaux pointent le bout de leur nez en janvier. Le rendement est faible : un voire deux agneaux par brebis. Cela est rare pour l’élevage ovin, mais cela s’explique bien ; en effet, comme les agneaux vont évoluer dans un milieu naturel “ouvert” et en quasi-autonomie, ils ont besoin de mères à leurs petits soins.
Des races spécifiques
Le Roussin de la Hague, le Suffolk ou le Vendéen sont les races élevées à la Ferme des Obiones. Ces races rustiques sont connues pour leur croissance lente mais encore leur bonne résistance à des conditions d’élevage en plein air et nécessitant donc de longues distances à parcourir.
Un élevage en plein air : la spécificité des herbus
Si les agneaux naissent à la ferme en bergerie, ils sont sortis sur les prairies autour de la ferme dès que la météo est clémente, à partir de février.
Dès le mois de mars, Sophie et Félix les mènent aux herbus. Il s’agit de grandes prairies d’herbes recouvertes périodiquement par les grandes marées, et recouvertes d’une végétation spécifique, dite “halophile” (qui poussent en milieu salé), composée d’obiones, de puccinelli, et de salicorne, dont sont friands les brebis et leurs agneaux.
Là, de mars à décembre, ils marchent des kilomètres sur des hectares de parcs mobiles, qui bougent chaque semaine. Ils ne se nourrissent que de l’herbe des prés-salés, et Sophie et Félix les visitent 2 fois par jour.
Une croissance lente
Les premiers agneaux sont commercialisés à 5 mois, et jusqu’à 10 mois. Ils grandissent donc beaucoup plus lentement que des agneaux classiques, d’une part car ils se dépensent beaucoup au quotidien, et parce que leur alimentation composée d’herbe des prés-salés n’est pas très riche.
L’agneau de pré-salé : une viande à la saveur subtile
Félix est catégorique. La viande d’agneau de pré-salé, caractérisée par sa couleur rosée, sa tendreté et son persillé léger, n’a rien à voir avec la viande d’agneau traditionnelle, réputée assez forte en goût. “Il existe des férus de viande de pré salé qui n’aiment pas, habituellement, l’agneau ! En effet, la saveur de la viande est beaucoup plus douce et subtile. On évoque souvent son goût noisette et très léger”. Ces caractéristiques s’expliquent par 3 facteurs principalement : l’alimentation constituée majoritairement de plantes halophiles ; les races rustiques comme Le Roussin de la Hague, Le Suffolk ou le Vendéen ; et la croissance lente au grand air sur de grandes étendues qui sont spécifiques à ce type d’élevage. La viande d’agneau de pré-salé fait donc partie, selon nous, des viandes d’exception !
Leurs engagements en matière de production
Sophie et Félix respectent des règles bien précises qui constituent le cœur du cahier des charges du label Agneau AOP “Prés-Salés du Mont-Saint-Michel” ; ils y sont engagés en tant que producteurs. En voici les points clés :
– les conditions d’existence de l’agneau d’abord : naissance, élevage, pâturage et abattage des animaux doivent obligatoirement se dérouler dans une aire géographique limitée autour de la baie du Mont-Saint-Michel, et l’abattoir doit se situer à moins de 4 heures de route. Par ailleurs, les agneaux sont élevés au minimum 115 jours et passent au moins la moitié de leur vie dans les prés-salés (les herbus).
– la race de l’agneau ensuite : les races sélectionnées sont adaptées au milieu naturel. Roussin de la Hague, Suffolk, Vendéen, Rouge de l’Ouest, Cotentin, Avranchin et Charollais, ces races rustiques et locales sont faites pour l’élevage de plein air et herbager.
– l’alimentation enfin : agneaux et brebis doivent être alimentés par le pâturage des prés salés, et ce pâturage maritime doit compter au minimum 70 jours. En hiver, les aliments doivent provenir principalement de la ferme et sinon de l’aire géographique.
Pour conclure, vous l’aurez compris, cette visite nous aura fait comprendre à quel point l’élevage d’agneau de pré-salé était exceptionnel !